Normcore : quand le normal devient tendance

C’est la nouvelle tendance qui remplit les pages des magasines de mode et de style. Le normcore explose et joue avec les codes, faisant du vêtement simple un objet fashion pour mieux se différencier des autres. Mais est-il vraiment possible de se ringardiser pour devenir cool ? Voyons-ça.

 

La normalité vue par les hipsters

La tendance vient, comme souvent, de New York. Récemment, les jeunes branchés, las de ne plus pouvoir se distinguer des autres, ont commencé à se réapproprier le style dont plus personne ne veut. Le normcore est né.

Mais dans les faits de quoi s’agit-il ? En fait, pour devenir une égérie normcore, il ne faut pas se tourner vers les papes de la mode classiques mais bien vers la classe moyenne (et plus encore, la classe moyenne coincée dans les années 80). Si l’on devait déterminer un ensemble représentatif, il faudrait imaginer le T-shirt simple, la polaire achetée dans un supermarché et un jean délavé sur des baskets informes.

Allant à l’inverse des canons de la mode qui cherchent la sophistication de la mode pour se différencier des masses, le normcore pousse ses adeptes à se normaliser à l’extrême. Mais cela pose un problème inédit : alors qu’avant on pouvait voir le citoyen lambda se plaindre que la mode c’est trop complexe, on se rend compte aujourd’hui qu’il est extrêmement difficile de faire la différence entre  une personne peu soucieuse de son style et une personne branchée à l’extrême. Il faut comprendre par là que la France profonde, celle qui ne dépense pas beaucoup d’argent dans les boutiques de mode, est devenue le modèle à suivre. Mais pourquoi donc ?

 

Pourquoi le normcore ?

Pour comprendre cette mode, il faut prendre un peu de recul sur les mécanismes typiques de la mode. Comme je le disais, quand on est branché, on tente de le montrer en proposant un style différent de celui du Français moyen. Mais Internet a changé la donne : à peine une mode est née chez les plus branchés que les médias mainstream s’en emparent et c’est la déferlante. Clips, publicités et magasins de vêtements débordent alors des mêmes symboles.

Il suffit de prendre le hipster comme exemple. Son symbole : la moustache, ironique et iconique. Elle devient un sujet de moquerie avant d’être reprise par tout le monde, sans forcément de cohérence. On trouve ainsi des moustaches sur les vêtements (homme et femme), dans les chansons (cf. les Français du dernier Eurovision) et même sur les tétines pour bébé, les glaçons et j’en passe.

Face à cette intégration des codes de la contre-culture de plus en plus rapide par le mainstream, les branchés doivent se marginaliser. Et quand on a atteint la marge et qu’on ne peut pas aller plus loin ? On retourne au début, profitant de la place laissée par les masses. Simple et efficace.

Et puisque l’on parle de retour, il ne faut pas négliger le côté cyclique de la mode, qui explique une partie de ce retour en force du ringard. Régulièrement, sont remis au goût du jour des styles que l’on pensait oubliés. Les années 70 ont connu un retour via les hipsters, pourquoi pas cette période indistincte qui s’étale entre les années 80 et 90 où le sweat Nike faisait autorité auprès des ados ? Parce que finalement, le normcore n’est que la représentation prévisible d’un retour aux sources, justifié par la super-personnalisation de la mode à laquelle s’oppose la normalité du normcore (en attendant la prochaine tendance, d’ici un ou deux mois).